Vincent Druguet dirige la filiale française de Wunderman, qui emploi 130 personnes. Partenaire de Marketo, dont le groupe déploie les solutions partout dans le monde, Wunderman compte au total plus de 7 500 collaborateurs à l’échelle internationale et fait partie de WPP (qui réunit de nombreuses entreprises, comme TNS Sofres, Ogilvy ou Young & Rubicam). Dédiée au digital, Wunderman a commencé à travailler sur la notion de CRM dès 1958.
- Les marques doivent produire de plus en plus de contenus : l’automatisation n’est-elle pas la solution idéale pour abattre autant de travail ?
Vincent Druguet : En théorie, l’automatisation semble être la meilleure solution. Dans les faits, il est désormais évident qu’il ne faut pas aller trop loin dans l’automatisation. Pourquoi ? La principale raison est que le numérique a changé notre façon de penser et a en quelque sorte « reprogrammer » notre cerveau. Les messages doivent être très pertinents, personnalisés à l’extrême et les informations être directement utilisables. Cette part là n’est pas automatisable. Par contre, il semble impératif d’automatiser la collecte des données. Pour ce qui est de l’interprétation des données, l’implication d’un être humain reste indispensable. Au Japon – pays où l’on travaille beaucoup sur l’automatisation et la robotique – une expérience est en cours pour remplacer un Directeur Marketing par un robot. Les premiers résultats sont décevants. Par ailleurs, le recours intensif, voire aveugle, à l’intelligence artificielle génère un « bad buzz » qui peut réduire à néant les efforts consentis.
- Les marques génèrent-elles trop de messages ?
Vincent Druguet : On constate effectivement que le niveau de saturation est dépassé et que les consommateurs réagissent. 84% des Français sont inquiets de l’utilisation qui peut être faite de leurs données personnelles. Autre fait marquant : la montée en puissance des bloqueurs de messages publicitaires. Plus de la moitié des Français de moins de 25 ans utilise maintenant ce type d’outils. En résumé, on peut dire que la frontière entre les échanges commerciaux entre entreprises et les échanges entre les entreprises et le grand public a été gommée. Si l’on bloque les messages publicitaires en B to C, on le fait également en B to B !
- Faut-il comprendre que l’intelligence artificielle et le marketing ne font pas bon ménage ?
Vincent Druguet : Non, surtout pas ! Il faut simplement que le marketing se repositionne. De nombreuses marques l’on déjà fait et l’on pourrait citer, par exemple, les vidéos personnalisées de Lexus, les messages d’Actimel, de Ricoré, ou encore les propositions « customisées » des soupes Campbell, associées au moteur d’IA d’IBM Watson. L’enjeu fondamental ne concerne pas l’opposition supposée entre l’intelligence artificielle et le marketing, mais la possibilité que les commerciaux et les services métiers utilisent quotidiennement les outils de l’intelligence artificielle.
Pascal Boiron, Digital CMO