Depuis le début de la crise du Covid-19, les grandes entreprises de la Tech sont en pointe dans la gestion de leurs employés face au risque sanitaire. Pour la plupart, elles n’envisagent pas un retour de leurs salariés dans leurs bureaux avant la fin de l’année. Parallèlement les annonces en matière de solutions de distanciation autour du collaboratif se sont multipliées. Dernière en date : le lancement de Work.com par Salesforce.
C’est fin mai que Mark Zuckerberg a annoncé que la moitié des 48 000 employés de Facebook pourraient être en télétravail permanent d’ici 5 à 10 ans et il a aussi annoncé la création de centres de travail à distance à Atlanta, Dallas et Denver. Jack Dorsey, PDG de Twitter, a également prévenu ses 4 000 employés que le télétravail pourra être prolongé. Chez Google, le CEO Sundar Pichai a déclaré que ses employés pourraient travailler à domicile jusqu’à la fin de l’année, voire même jusqu’en 2021 selon d’autres sources. Cette tendance semble largement adoptée par l’écosystème californien de la Tech selon la presse spécialisée américaine.
L’une des premières conséquences de ce changement de mode de travail est la réduction de 30% du projet Willow Village de Facebook. Annoncé en 2017 dans la baie de San Francisco, ce campus de 11 600 m2 devait accueillir 1 500 logements, un hôtel de 250 chambres, des équipements collectifs et des bureaux pour les employés de la firme. Même si Facebook assure que la réduction de son projet de cité ouvrière du XXIème siècle -dont les travaux doivent être lancés en 2021- n’est pas dû au développement du télétravail, on peut quand même en douter.
Toujours en termes d’immobilier, la réduction du nombre d’employés dans les bureaux de la Silicon Valley y diminuera (peut-être) la pression immobilière et permettra, en plus, aux géants de la Tech d’investir beaucoup moins dans l’agrandissement de leurs bureaux. Pour recruter et conserver leurs employés, les GAFA ont promu des concepts de larges bureaux intégrant des services à la personne mais avec l’amplification du télétravail, le développement de ces nouvelles cités radieuses pourrait logiquement s’atténuer. Des économies en vue pour la Tech…
Les services de distanciation : un nouveau eldorado pour la Tech et une menace pour bien des secteurs d’activité
Mais les contraintes créées par la nécessaire distanciation du Covid-19 pourraient également représenter de nouvelles opportunités pour l’industrie de la Tech. Les services de distanciation sont en train de devenir un marché à part entière et les résultats de Zoom le prouvent : dix millions d’utilisateurs en décembre 2019 et 300 millions en avril 2020 ! Cette plateforme californienne de messagerie instantanée et de vidéoconférence a doublé son chiffre d’affaires et devrait passer facilement le cap des 1,5 milliards de revenus cette année.
Pour concurrencer Zoom, Microsoft a ajouté des fonctionnalités à Teams avec notamment une utilisation gratuite de réunions en visioconférence alors qu’auparavant au moins l’un des participants devait disposer d’un abonnement Microsoft 365. Toujours pour concurrencer Zoom, Google a simplifié et amélioré Meet tandis que Facebook a lancé Messenger Rooms, sa solution de visioconférence.
En plus de ces solutions, de nouveaux outils et services collaboratifs adaptés à la distanciation sont développés par la Tech et sont susceptibles de viser de nouveaux marchés comme l’événementiel d’entreprise, la relation commerciale ou la gestion des ressources humaines et la formation. Ainsi Saleforce, l’un des leaders des services de relation client et des applications de CRM, a lancé la plateforme work.com pour les directions des ressources humaines. C’est Olivier Derrien, responsable de Salesforce en France, et Guillaume Pépy, ancien PDG de la SNCF dorénavant au comité de surveillance de Salesforce en Europe, qui ont présenté cette solution lors d’un webinar organisé le 12 juin dernier. Conçue sur la plateforme de Salesforce cette solution permet de gérer les flux des employés dans les bureaux, des enquêtes de ressources humaines, de créer des dashboard et de réaliser des formations.
L’inexorable digitalisation de la Tech sera-t-elle acceptée par les salariés ?
Finalement l’écosystème de la Tech poursuit sa croissance avec la même méthode et le même génie. La crise du Covid-19 impose la distanciation ? La conscience environnementale des consommateurs exige la limitation des déplacements polluants ? Les marques veulent une relation client one to one ? La Tech répond à ces besoins mais avec des solutions susceptibles de cannibaliser bien des secteurs d’activités. Le secteur de l’événementiel est le premier concerné. En France, il génère, selon les sources, plus de 30 milliards d’euros de retombées économiques. L’industrie de la Tech a déjà multiplié ses webinars et décidé de digitaliser ses grandes messes annuelles comme l’indique l’organisation de la prochaine conférence de AWS ou celle à venir de HPE le 23 juin prochain.
Les autres grands secteurs d’activité vont-ils suivre ? Les entreprises vont-elles en profiter aussi pour digitaliser massivement d’autres usages comme la négociation commerciale ou la formation ? Une partie de la réponse est du coté des salariés et de ce qui leur sera proposé en matière d’organisation et de conditions de télétravail. Mais au delà des discussions réglementaires en cours sur le télétravail, ce sont aussi les aspirations des salariés dans ces domaines qu’il faudra observer. L’industrie de la Tech est déjà prête à changer leur vie au travail.