Vice-présidente de la Branded content marketing association (BCMA) et précédemment global digital manager marketing de la marque Lancaster, Julie Dardour pense que les marques devront être utiles et authentiques pour convaincre leurs clients en sortie de crise. Selon elle, le marketing de contenu sera alors essentiel pour fidéliser les clients et en attirer de nouveaux.
Vincent Biard – Quel est l’objectif de l’association BCMA dont vous êtes vice-présidente ?
Julie Dardour – C’est une association née à Londres il y a quinze ans avec une présence dans 14 pays. Nous l’avons relancé en France depuis le mois d’octobre avec cinq membres au bureau et une trentaine d’adhérents comme des grandes régies. L’idée est de constituer une association transmétiers pour fédérer tous les savoir-faire autour de la production de contenu et non de traiter le brand content par spécialité comme la prod, les medias, etc. L’objectif est de promouvoir cette spécialité avec comme grand projet la proposition d’outils de mesure pour démontrer l’utilité du brand content. Des outils ont été ainsi développés au Royaume-Uni avec notamment Ipsos Mori pour disposer d’indicateurs de performance. Nous souhaitons introduire cette notion en France afin de structurer le marché mais aussi pour en définir les limites. Par exemple, la communication de crise qui est le sujet du moment n’est pas du brand content.
Vincent Biard – L’un des enjeux du marketing de contenu est d’établir son utilité avec des indicateurs crédibles et communs. Comment faire ?
Julie Dardour – L’association BCMA souhaite permettre aux annonceurs et aux agences de comprendre les bonnes pratiques du brand content et les bons KPI avec l’idée que les budgets consacrés au brand content ne soient pas que des activations de marque mais aussi des actions à long terme dans l’esprit du nouveau marketing. Nous souhaitons lancer un observatoire pour étudier le brand content en France et publier un vrai indicateur pour le marché français mais la crise actuelle en retarde évidement l’organisation. En parallèle de cet observatoire, nous travaillons à créer cette communauté, organiser des débats, faire comprendre les spécialités du brand content. Un contenu aujourd’hui ne doit pas être destiné à un seul point de contact mais doit être pensé pour être diffusé auprès de différentes audiences. Un des grands KPI aujourd’hui est l’audience. Le brand content s’inscrit dans une optique durable même si construire un programme de brand content pour un effet immédiat de ventes plairait à beaucoup… Créer et développer une audience engagée avec la marque pour travailler sur les consommateurs à venir ou les fidéliser est un levier très important.
Vincent Biard – Le confinement a engendré une forte hausse du trafic sur internet. Comment les marques peuvent-elles faire fructifier cette audience ?
Julie Dardour – Nous avons organisé une session live avec nos adhérents. Nous voyons bien que les marques ne savent pas comment se positionner mais elles ne pourront pas revenir après le 11 mai avec une publicité promotionnelle sans explications et sans contexte. Comment reprendre la parole et comment la contextualiser ? Cela passera par du contenu travaillé comme un échange éditorial. Le contenu s’inscrira dans une optique de preuve. Les marques qui fonctionnent pendant le confinement sont les marques utiles comme par exemple les marques de sport ou de cuisine dont certaines ont développé des contenus de grande qualité. D’autres marques ont capté des audiences avec des contenus serviciels qui leur permettront peut-être de rester en contacts avec leurs clients.
Vincent Biard – Avant la crise, l’une des tendances fortes du marketing digital étaient la fidélisation avec développement d’applications et la mise en place du consentement ainsi que l’éthique, comment renforcer cette relation de confiance ?
Julie Dardour – Par un recentrage sur des valeurs d’utilité. Je crois qu’aujourd’hui nous sommes passés à un marketing plus transparent et les marques doivent travailler sur leur propre véracité. Il y a un contexte de gravité et les marques doivent s’y adapter. Les clients ne seront pas forcement réceptifs à la futilité. Avec le confinement, nous observons une tendance du content product avec la description des produits. Comme on ne peut pas les toucher et que l’on ne va certainement pas pouvoir le faire facilement lors du déconfinement, il y aura notamment un travail sur les fiches produits des marques et des retailers qu’il faudra étoffer. Etre authentique dans le discours de fond et encore plus précis dans le discours de forme. Pour nous, le brand content sortira gagnant de la crise parce que l’on a demandé de l’engagement et des preuves aux marques et que les preuves seront amenées par le brand content.
Site web : https://www.bcmafrance.com/