Le digital et les technologies innovantes ont envahi tous les métiers, avec à la clef d’incontestables nouvelles opportunités. Pour autant, comme pour les révolutions précédentes, la transformation digitale des entreprises véhicule quantité de peurs et de fantasmes.Eric LENOIR, Président du Comité Exécutif d’Euler Hermes France, n°1 de l’assurance-crédit, nous explique comment se prémunir des risques liés à cette incontournable révolution.
Digital CMO – Quels sont les risques majeurs liés à la transformation digitale des entreprises ?
Eric LENOIR : On observe une augmentation sensible de la cybercriminalité. L’an passé, environ 60% des entreprises ont été victimes, à plus ou moins grande échelle, d’une cyberfraude, piratage de circuits spécifiques, blocage des systèmes d’information, utilisation détournée des mails…
Ces attaques ont d’abord frappé les grandes entreprises qui ont rapidement mis en place les moyens pour parer ce type de menaces. Les PME, moins sensibilisées et disposant de moins de moyens de prévention, sont aujourd’hui la cible privilégiée des cybercriminels.
La fraude « digitale » se traduit également par la transposition des schémas classiques de manipulation d’identité, collusion entre entreprises et autre carambouille.
Mais le risque majeur pour les entreprises face au digital c’est surtout de rater le virage du digital. Comme pour la mondialisation et l’export, le digital est encore trop perçu comme l’affaire des grands groupes. La France accuse un retard important dans ce domaine par rapport à d’autres pays européens. Il est essentiel que l’ensemble des dirigeants, de toutes tailles d’entreprises, aidés par l’ensemble des acteurs économiques, fassent preuve de clairvoyance et engagent leur entreprise et leurs salariés dans cette incontournable transformation. Ne pas mesurer la nécessité d’embarquer et de former ses collaborateurs à ces nouveaux enjeux stratégiques est également un risque majeur pour la pérennité de son entreprise.
Digital CMO – Justement, la robotisation et le recours massif à toute forme d’intelligence artificielle modifient profondément les métiers et les carrières des salariés inquiets pour leur devenir. De quelle façon Euler Hermes entretient-elle l’employabilité de ses effectifs ?
Eric LENOIR : Euler Hermes a pris très tôt conscience de la nécessité d’accompagner et de sensibiliser ses collaborateurs à la transformation digitale. Il est communément admis que cette révolution entraînera une évolution des profils.
Par le biais d’un questionnaire simple, nous avons établi un état des lieux du degré de maturité digitale de nos collaborateurs afin de construire un programme d’accélération et de montée en compétences.
Nous encourageons le reverse mentoring pour que les plus jeunes insufflent les nouvelles pratiques aux collaborateurs moins aguerris. Nos Good Morning Digitaux sont l’occasion d’aborder des thèmes plus ou moins complexes pour faire évoluer nos collaborateurs vers un degré de maturité plus élevé. Nous avons aussi mis en place le Digital Tour, un cycle de formations thématiques conçues de façon pédagogique et ludique pour démystifier les concepts clés du digital. Enfin, la cartographie actuelle des compétences versus la cartographie idéale des compétences nous permettra de mettre en œuvre, de façon participative, des plans de formation évolutifs.
Les nouveaux traitements de la data, les API entre autres sujets, nous amènent également à recruter de nouveaux profils très spécifiques qui viennent renforcer cette culture de l’innovation digitale dans l’entreprise.
Digital CMO – De quelle façon, et dans quels domaines en particulier, Euler Hermes utilise t’elle cette innovation digitale pour améliorer sa relation client ?
Eric LENOIR : Nos data scientists testent actuellement, sur certains pays européens, des algorithmes de prédiction de défaut de paiement qui nous permettent d’être jusqu’à 20% plus prédictifs de façon à mieux protéger nos clients et améliorer la qualification du risque. Les nouvelles technologies concourent aussi à faciliter les échanges avec nos clients dans tous les domaines et à devenir un partenaire de croissance. Nous développons en ce sens des parcours de souscription 100% digitaux pour simplifier l’accès à nos produits.
Digital CMO – Euler Hermes se sent- elle menacée par l’émergence de startup qui innovent dans ses domaines de compétences ? Comment travaillez-vous avec cet écosystème ?
Eric LENOIR : Nous sommes partenaires de fintechs du système bancaire, comme Cash in Time du Crédit Agricole, et URICA, auxquelles nous apportons notre expertise en matière d’appréciation et de couverture du risque. Nous avons choisi pour l’instant de nouer des relations commerciales avec cet écosystème, d’intégrer nos services comme un plus à forte valeur ajoutée dans leur business model et donc de jouer un rôle d’accélérateur dans certain cas.